Le nombre de Québécois qui seront atteints de démence va carrément doubler d’ici 20 ans, un véritable «raz de marée» prévisible, mais pour lequel le réseau de la santé n’est pas prêt, dénoncent plusieurs experts.
«La prochaine maladie du siècle, c’est l’Alzheimer [qui représente 64 % des cas de démence]», résume Nouha Ben Gaied, directrice de la recherche et du développement à la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer.
«Fléau», «hécatombe», «raz de marée» : les experts ne mâchent pas leurs mots pour qualifier la hausse du nombre de cas de démence dans les prochaines années.
L’Alzheimer est la forme la plus courante de démence, qui regroupe le spectre des symptômes associés au déclin des fonctions mentales (voir tableau).
«C’est un véritable problème, croit Sylvie Belleville, directrice de la recherche à l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal. [...] On le sait que ça s’en vient.»
Devant ce constat, «Le Journal de Montréal» a voulu savoir quel sera l’impact économique de la démence et de l’Alzheimer d’ici 20 ans, et si le réseau de la Santé est prêt à faire face à cette vague.
Selon les prévisions du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), 296 333 Québécois de 65 ans et plus seront atteints de démence en 2035. C’est près du double par rapport aux chiffres de 2015. Malgré cela, le MSSS n’a pas de prévisions du fardeau financier de la maladie.
«On ne sépare pas les investissements par maladie, souligne en entrevue au «Journal» le ministre de la Santé, le Dr Gaétan Barrette. [...] On ne fonctionne pas comme ça au gouvernement en termes de prévision budgétaire.»
Plus de 16 milliards $
«À peu près tout le monde peut faire des prévisions là-dessus, à part le ministère de la Santé, déplore le Dr Alain Naud, omnipraticien. [...] Le coût de ne rien faire, on va le payer avec beaucoup d’intérêt dans 10 ou 20 ans.»
Toutefois, le MSSS réfère «Le Journal de Montréal» aux prévisions de la Société canadienne de l’Alzheimer. Selon l’organisme, le fardeau de la maladie au pays augmentera de 60 % de 2016 à 2031, passant de 10,4 à 16,6 milliards $.
«Il y a beaucoup d’impacts économiques qui seront difficiles à stopper parce qu’on n’a pas de vision à long terme», croit aussi le Dr Ziad Nasreddine, neurologue.
À ce sujet, le Dr Barrette consent que le réseau devra faire l’objet d’investissements (infrastructures et personnel) pour faire face à la hausse du nombre de cas.
Déjà, plusieurs voix réclament l’élargissement de l’aide médicale à mourir pour inclure ces patients, qui ne peuvent offrir un consentement éclairé en fin de vie.
«On doit se donner une humanité et arrêter d’être bureaucrates», croit Manon Boudriau, dont le fils de 36 ans est atteint d’Alzheimer.
«Arrêtez de sauver n’importe qui à n’importe quelle condition», dit-elle.
«Maladie terrible»
Dans un contexte où la population est vieillissante, les cas de démence sont en forte progression dans plusieurs pays. La raison est simple : l’âge est le principal facteur de risque, après 65 ans.
«Les gens veulent vivre longtemps, mais aussi en santé. Le problème, c’est que l’Alzheimer nous vole les acquis qu’on a eus en sciences, observe Mme Belleville. [...] Ces belles années où on pensait être proches de nos enfants et petits-enfants, finalement, on souffre d’une maladie terrible.»
«Pas prêts»
«On ne serait pas prêts demain à accueillir le double de cas. Mais il commence à y avoir une sensibilisation des gouvernements à reconnaître que tout ce qui entoure le vieillissement doit être une priorité», nuance Mme Belleville.
Selon le Dr Nasreddine, cette maladie est victime d’âgisme dans la société puisqu’elle touche une population vieillissante.
«C’est comme si on est obligés d’attendre que ça touche tellement de monde, et que ça devienne une évidence, qu’il faut investir là-dedans. Même s’il sera trop tard pour une certaine génération.»La démence en chiffres
Elle peut être causée par différentes maladies ou blessures touchant le cerveau. Sa forme la plus courante est la maladie d’Alzheimer, qui représente 64 % des cas. Parmi les autres formes, il y a la démence vasculaire, soit des pertes cognitives liées à une atteinte du réseau vasculaire cérébral, et la démence à corps de Lewy, qui se caractérise par des dépôts de protéines dans les cellules nerveuses du cerveau.
Le tiers des personnes âgées de 85 ans et plus seront atteintes.
Espérance de vie au moment du diagnostic : de 7 à 10 ans.
Qu’est-ce que l’Alzheimer?
Maladie irréversible qui détruit les cellules du cerveau et cause des troubles de la pensée et de la mémoire. Des plaques minuscules et toxiques (plaques amyloïdes) finissent par étouffer les cellules saines et causent leur mort.
Symptômes
Pertes de mémoire (court et long terme)
Perte de jugement
Sautes d’humeur
Changements de comportement
Difficultés à communiquer
Facteurs de risque
Âge
Sexe (les femmes sont davantage touchées que les hommes)
Génétique
Maladies cardiovasculaires
Dépression
Commotions cérébrales
Diabète
Hypertension
Tabagisme
Obésité
Facteurs «protecteurs»
Niveau d’éducation (minimum 15 ans)
Activité physique
Stimulation cognitive
Saines habitudes de vie
Coût net annuel d’un lit en CHSLD
2015-2016: 82 448 $
2014-2015: 82 006 $
2013-2014: 79 487 $
2012-2013: 77 522 $
2011-2012: 74 973 $
Espérance de vie en CHSLD : 28 mois (2015).
Source : MSSS et Fédération québécoise des sociétés Alzheimer
Prévisions du nombre de Québécois de 65 ans et plus atteints de démence
2015: 152 084
2025: 213 278
2035: 296 333
Hausse sur 20 ans : 95 %
Source : prévisions du MSSS, selon des données de l’Institut de la statistique et de l’étude américaine «Prevalence of dementia in the United States».
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