MONTRÉAL — Le cercle vicieux peut être difficile à briser: plus on souffre, moins on dort, et moins on dort, plus on dirait que ça fait mal.
Des chercheurs américains viennent de découvrir que le manque de sommeil augmente non seulement la sensibilité à la douleur, mais que cela réduit en plus la capacité du cerveau à atténuer la souffrance.
Les scientifiques de l’Université de la Californie à Berkeley écrivent dans le Journal of Neuroscience que cela jette un nouvel éclairage sur les épidémies mondiales d’insomnie, de douleur chronique et même de dépendance aux opioïdes.
L’auteur principal de l’étude, le professeur Matthew Walker, estime qu’on devrait donc accorder une importance beaucoup plus grande à la qualité du sommeil des patients, surtout quand il est question de la gestion de leur douleur.
En appliquant une chaleur inconfortable aux jambes d’une vingtaine de jeunes cobayes en santé en même temps qu’ils mesuraient leur activité cérébrale, M. Walker et ses collègues ont découvert qu’un manque de sommeil interfère avec les mécanismes neuraux qui détectent la douleur, l’évaluent et activent son soulagement.
Non seulement les chercheurs ont-ils détecté une plus grande sensibilité à la douleur, comme en témoigne une augmentation de l’activité du cortex somatosensitif, ils ont aussi été surpris de constater une réduction de l’activité du noyau accumbens, une région du cerveau qui augmente notamment les niveaux de dopamine pour soulager la douleur.
Le manque de sommeil a également ralenti l’activité du cortex insulaire (ou insula), la région du cerveau qui évalue l’intensité de la douleur et prépare l’organisme à y répondre. Il s’agit d’un système «critique», disent les chercheurs, qui évalue et classe les signaux douloureux, permettant aux analgésiques naturels du corps d’intervenir.
Les scientifiques avaient recruté 25 jeunes adultes ne souffrant pas de problèmes de sommeil ou de douleur aux fins de leur étude. Ils ont tout d’abord mesuré leur résistance à la douleur après une bonne nuit de sommeil, ce qui leur a permis de comparer comment le manque de sommeil affectait cette tolérance.
Ainsi, les participants étaient en mesure de tolérer une chaleur moyenne de 43,89°C après avoir bien dormi, mais de seulement 41,67°C après avoir été privés de sommeil.
Une imagerie par résonnance magnétique a montré une augmentation de l’activité du cortex somatosensitif et une désactivation du noyau accumbens et de l’insula, ce qui témoigne d’un dysfonctionnement des mécanismes neuraux qui gèrent la réponse physiologique à la douleur.
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