
Peste de Justinien dans l'antiquité, peste noire au Moyen-Âge, peste mondiale dans les années 1890-1910... La plus effrayante des pandémies fait des ravages depuis la nuit des temps (voir encadré). Et cette nuit est encore plus profonde qu'on le pensait jusqu'ici.
Une équipe scientifique a en effet identifié la maladie comme cause de la mort sur des corps inhumés dans la région de Samara (Russie), entre Moscou et la frontière kazakhe, depuis 3.800 ans. « Cela repousse de 1.000 ans l'âge supposé de la peste bubonique », expliquent-ils dans une étude publiée vendredi dans la revue Nature Communications.
Cette équipe composée de douze chercheurs (*) a montré que les corps retrouvés avaient succombé à la bactérie Yersinia pestis, la même souche que celle qui provoquera par la suite les grandes épidémies. « Cette souche est la plus ancienne séquencée à ce jour qui contienne les facteurs de virulence considérés comme caractéristiques de la peste bubonique », confirment-ils dans un communiqué publié par l'Institut Max-Planck d'histoire de l'humanité à Iéna (Allemagne).
Cela montre qu'à l'Âge du bronze - l'époque où sont mortes ces deux personnes -, « il y avait au moins deux lignées de la peste circulant de manière contemporaine » en Eurasie.
On estime que la Peste de Justinien, qui a frappé l'Europe et l'Orient aux VIe et VIIIe siècles, a fait entre 25 et 100 millions de morts - des textes anciens font état de 5.000 morts par jour dans la seule ville de Constantinople. Au Moyen-Age, sous le nom de Peste noire, elle a décimé en cinq ans (1347-1352) de 30 à 50 % de la population européenne, faisant près de 25 millions de victimes.
Dernière grande pandémie, la peste de Chine est partie de Hong Kong en 1984 avant de toucher 77 ports sur les cinq continents. Madagascar, le Japon et le Portugal furent atteints en 1899, Sydney et San Francisco l'année suivante, puis Java en 1910, Ceylan en 1914, et la France en 1920. On lui attribue une dizaine de millions de morts.
Restait à savoir à quelle époque Yersinia pestis a acquis la capacité à survivre chez les puces, qui s'avèrent les vecteurs de transmission à l'homme. Le décodage du génome du bacille qui a tué ces deux ancêtres des Russes a permis de dire que c'était y a quelque 4.000 ans.
Un fléau toujours pas éradiqué
La peste, un fléau du passé ? Malheureusement non. Le chercheur américain Thomas Butler a recensé 21.725 cas de peste dans le monde entre 2000 et 2009 dont 1.612 mortels, principalement dans « des pays africains touchés par la pauvreté et les troubles civils », la République démocratique du Congo en tête. De 2010 à 2015, l'OMS a dénombré 3.248 nouveaux cas, dont 584 mortels.
Et tout récemment encore, en août 2017, l'organisation mondiale de la Santé (OMS) a lancé une alerte sur l'épidémie de peste « sans précédent » qui a frappé Madagascar faisant 124 morts au moins. Si les épidémies antérieures étaient surtout liées à la peste bubonique (transmise par la piqûre de puces infectées, NDLR) en milieu rural, celle de 2017 était liée à la peste pulmonaire en milieu urbain transmise de personne à personne.
La peste demeure une maladie particulièrement dangereuse avec un taux de létalité de 30 % à 60 % dans sa forme bubonique. En l'absence de traitement, elle s'avère presque toujours mortelle dans sa forme pulmonaire.
(*) Maria A. Spyrou, Rezeda I. Tukhbatova, Chuan-Chao Wang, Aida Andrades Valtueña, Aditya K. Lankapalli, Vitaly V. Kondrashin, Victor A. Tsybin, Aleksandr Khokhlov, Denise Kühnert, Alexander Herbig, Kirsten I. Bos & Johannes Krause.
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